Roxane Maurer

Artiste peintre – 1960-2014

Exposition "Passage" - Scriptoscopie d’une exposition - Reportage de Bernard Mardon





Scriptoscopie d’une exposition - Reportage - Témoignage de Bernard Mardon - Ateliers 22 - Genouilly Correspondant des "Chemins de Traverse" pour l’Association "Ours Blanc". Manufacture de Porcelaine Deshoulières Exposition "Passage"
Du 6 Septembre au 31 Octobre 2014 - Sculpture, Dessin, Peinture, Photo - 18500 Foëcy



C’est d’abord une idée, une envie, une initiative, un projet, un lieu, un environnement (Musée de la Porcelaine), une salle (un ancien entrepôt de la manufacture), un triple évènement. Sous ce terme sourde une symbolique forte qui prend tout son sens dans l’existence et le développement même du projet en question, de sa maturation, sa réalisation, jusqu’à l’élever à un véritable concept. A l’initiative de Yo Pinier, sculpteur céramiste et Jac Pinier, photographe, tous deux exposants, est introduite, à titre d’hommage, une troisième dimension artistique d’œuvres picturales récentes : peintures, acryliques, fusains, graffitis et tags de la regrettée Roxane Maurer qui nous a quittés prématurément.
Francis Vladimir et Laurent Nouazet, en charge de dresser inventaire de la collection pléthorique léguée par Roxane, facilitent la sélection des œuvres destinées à « Passage », opérée par Yo et Jac.
Ce choix murement réfléchi, prend en compte les connivences et affinités propres à réussir le mariage et l’équilibre entre les 3 dimensions portées par chacun des 3 artistes.

Par la force des choses, en l’absence de Roxane, ce sont les quatre protagonistes qui mettent en commun toute leur énergie pour installer les œuvres, avec comme objectif premier : les valoriser pour ce qu’elles sont et représentent individuellement tout en réussissant leur coexistence de voisinage pour réussir cet ensemble ; et ce : compte-tenu du rôle important que joue le lieu d’exposition lui-même.
Menées dans une ambiance de franche camaraderie, cette délicate opération aura nécessité deux jours pour aboutir. Et c’est après la remise en question du résultat atteint dès le premier soir que le satisfecit consensuel est atteint à l’issue de la seconde journée, veille du vernissage.
Equilibre, harmonie et symbiose des trois domaines artistiques présentés. Bravo à la maîtrise d’ouvrage menée en quatuor qui aura su interpréter sa partition, frappée au sceau de l’excellence.

Le temps fort que représente un vernissage (5 Octobre 2014) est relevé - cerise sur le concept - par la présence du groupe musical « Roue libre », un quintet conduit par Yves Benhamou. Accordéons (2), clarinette, guitare et rythmique nous bercent d’une musique folklorique sans frontière, aux accents tziganes et aux réminiscences ashkénazes.
Des couleurs et des saveurs sonores d’excellent aloi pour souligner l’évènement et accompagner ce déploiement d’arts plastiques et photographiques. Elles s’ajoutent et s’intègrent à l’hommage rendu à Roxane Maurer.

Les sculptures de Yo et les Correspondances de Jac :
Je laisse céans à ces deux créateurs le soin de développer eux-mêmes, s’ils le souhaitent leur univers ici exposé.

Dans ce relai artistique original à trois acteurs, Jac nous facilite lui-même le « Passage de témoin » par cette appréciation : «  C’est une belle rencontre que ce « Passage », avec un mélange de nos travaux respectifs mais qui s’articulent si bien dans notre constance à faire vivre cette complémentarité avec Yo et Roxane. »

Sous l’égide respective de Jac et Yo, mari et femme dans la vie, les photographies et les sculptures, au long des expositions, comme à chaque fois qu’elles se rencontrent : voisinent, se regardent, deviennent complices, s’unissent et s’épousent pour le « meilleur et le meilleur » ! Ainsi, cette bivalence a trouvé sa complémentarité et son équilibre à l’épreuve du temps. Dès lors, qu’est ce qui pourrait venir troubler et désunir cette bivalence ?

A l’inverse, qu’est-ce qui pourrait venir l’enrichir ? En l’occurrence, pour ce « Passage », une arlésienne.
Contrainte par la maladie et privée prématurément de sa vie terrestre, cette arlésienne est omniprésente à travers les extraits de ses créations, sélectionnées avec soin par le quatuor susnommé. Les thématiques choisies et exposées représentent deux périodes parmi les plus récentes de son activité artistique.
L’antépénultième avec des peintures et fusains acryliques tels : la série des femmes qui pleurent et la femme et l’enfant.
Les visages comme les attitudes de ces femmes magnifiques qui laissent couler leurs larmes où de celle-ci encore qui semble se détourner de son enfant, qu’ils soient nés du pinceau ou du fusain, sont le résultat d’un trait sûr précis, sobre, non dénué de spontanéité, voire d’une certaine violence (à l’exemple du visage de l’enfant). Au final, ce qui se dégage des visages et des attitudes de ses personnages : c’est l’intensité et la profondeur de leur expressivité. Des œuvres chargées de messages induits et de symboliques fortes pour qui sait les capter et les décoder. Pour l’ensemble de ces raisons, ses œuvres ne peuvent donc renier leur filiation car elles sont le fruit du mental et de la sensibilité de leur créatrice.
La pénultième période est représentée par les « photograffitis » appelées également « pictoclichés ». Il s’agit d’un travail accompli à partir de graffitis et de tags préexistants.

« A 40 ans, Roxane subit une opération qui lui laisse un bras, le droit, inutilisable pour la peinture. »
Animée par une volonté hors du commun, elle continue à vouloir créer et se tourne alors vers les tags et graffitis qu’elle a l’opportunité de rencontrer, pensant, à juste titre, pouvoir tirer parti des extraits les plus intéressants des points de vue : scriptural, dessin, rythme, couleur, lumière, mouvement, voire d’une certaine musicalité visuelle. Ces extraits sont photographiés puis numériquement traités par ordinateur. Ainsi leur conférant d’autres proportions, les habillant d’autres couleurs, les assemblant différemment, elle se livre à une véritable recréation à partir de ces matériaux préexistants, comme s’il s’agissait là d’œuvres peintes.
Ne nous laissons pas entraîner dans l’appréciation d’un art qui, en première lecture, peut sembler minimaliste, tant ce travail en séquences sélectionnées est traitées avec soin et dont le résultat final est signifiant pour qui sait les apprécier.

Quand un artiste disparaît : on dit qu’il s’absente car celui-ci continu de vivre à travers ses œuvres, pour qui sait les apprécier. Preuve en est, notamment, avec la trilogie « Passage ». Et les esprits ouverts l’auront d’ores et déjà compris ; vous pouvez compter sur ses pairs Yo et Jac, entre autres, pour entretenir la flamme.
Dans ce triptyque ici exposé, chaque créateur se fait l’ambassadeur de sa propre discipline.
Incontestablement, la quatrième dimension se définit par les lieus chargés d’histoire industrielle et de symbolique forte.
Le cinquième élément est composé par le public qui vient apprécier les œuvres et faire connaissance avec leurs auteurs.
A juste titre, Lao Tseu nous a enseigné en son temps qu’une œuvre, comme la façade d’une maison, appartient à celui qui la regarde. Alors, sachons être aussi sages que ce sage.
Relevés à chaud dans le livre d’or mis à disposition sur les lieux de « Passage », ces quelques témoignages précis et concis de visiteurs abondent à escient la thèse de ce grand ancêtre et viennent à propos conclure mon propos...


- « Magnifique musée où se marient à merveille l’artiste et l’ouvrier dans de très belles créations ! »
- « Une leçon à tirer pour notre époque dans laquelle le travail ouvrier n’est plus reconnu. »
- « Très belle rencontre entre trois univers qui dans leurs différences portent en commun une belle humanité ! »

Trois artistes, trois créateurs, trois univers passionnants qui ont bien fait de se rencontrer qui s’enrichiraient et nous enrichiraient à se rencontrer de nouveau.
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Une exposition appréciée sous le regard du poète
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Correspondance entre arts visuels et écriture déclamative
Dédiée à Yo, Jac et Roxane, trio magique de création
Dédicace spéciale pour Valère Staraselski
Dédicace amicale pour Francis Vladimir et Laurent Nouazet

Peintures et acryliques, picto-clichés, fusains,
Correspondances photos et sculptures, à dessein,
Projet élaboré, sélection, accrochage,
Mise en scène aboutie, invités, vernissage

Inspirant le poète devant ce paysage
Issu de la rencontre et la mise en partage,
Les œuvres et créations de ces trois personnages,
Mises à disposition de tout aréopage,

Par leur art inspiré, présenté sans clivage,
En parfait équilibre, en un subtil dosage,
Posant en écriture et rimant son verbiage,
Le temps insaisissable lui dicte ce message

Qu’il décline à raison sous forme d’un adage :
De telle conjonction qu’on soit sage ou pas sage,
Comme ces occurrences, la vie n’est qu’un passage
Mais l’art - lui - survivra. Voilà plus qu’un présage.

Bernard Mardon
- Octobre 2014 -


NDLR - Pour plus ample informé :

Yo Pinier cf.
« Chemins de Traverse » n° 42, Juin 2013, page 39, photos de sculptures, textes de Bernard Giusti et Jacques Pinier.
Page 40 - Photos, poème de Bernard Mardon « La sculpture révélée » et texte de Yo.

Jac Pinier cf.
« Chemins de traverse » n°44 - Juillet 2014, photo : première de couverture
Photos : page 9 - 25 -26 -27 -28 - 31- 32 - 36 - 49 - 51 - 54 - 55 - 58 -
Auto portrait : « Le cheminot de la photographie
Le n°45 « Hommage à Roxane Maurer » permet de mieux connaître cette artiste d’exception.